Note sur l'actualité économique et sociale
Le gouvernement Sarkozy/Fillon est en train démanteler le modèle social français (franchise médicale, réforme du code du travail, indemnisation chômage et défiscalisation coût du travail, régimes spéciaux...), mis en place après la seconde guerre mondiale comme l'a dit cruement Denis Kessler, ancien n° 2 du MEDEF, dans le journal Challenge du 4 octobre 2007 : « Le modèle social français est le pur produit du Conseil national de la Résistance. (...) Il est grand temps de le réformer, et le gouvernement s’y emploie. Les annonces successives des différentes réformes par le gouvernement peuvent donner une impression de patchwork, tant elles paraissent variées, d’importance inégale, et de portées diverses : statut de la fonction publique, régimes spéciaux de retraite, refonte de la Sécurité sociale, paritarisme… A y regarder de plus près, (...) il y a une profonde unité à ce programme ambitieux. (...) Prenez tout ce qui a été mis en place entre 1944 et 1952, sans exception. (...) Il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945, et de défaire méthodiquement le programme du Conseil national de la Résistance ! (...) » Des propos a priori de bon sens cachent de fait un projet de destruction de notre modèle social de solidarité au profit d'un modèle basé sur la charité et au bénéfice des plus riches.
Les tensions économiques internationales s'accumulent : hausse du prix du baril du pétrole (96,24 $ le 31 octobre) due à une insuffisance de l'offre, condamnée à baisser (pic de Hubbert), hausse du prix des denrées alimentaires comme le blé à cause de la baisse de la production dans les pays exportateurs comme l'Australie, victimes de sécheresses prolongées, appréciation continue de l'euro, crise financière globalisé (des subprimes américains à la chute de rentabilité des banques). Face à cela, une relance keynésienne classique n'est plus possible comme durant les trente glorieuses car cette croissance, prédatrice en ressources naturelles, entraîne des tensions sur l'ensemble des marchés de matières premières. De même, l'effet rebond (augmentation de consommation liée à l'amélioration d’une technologie) amplifie ce phénomène. La globalisation de nos modèles de production et de consommation font qu'aujourd'hui la croissance des uns ne peut être compensée que par l'exploitation des autres. Le seul critère pertinent, l'empreinte écologique (mesure en hectares de la superficie biologiquement productive nécessaire pour pourvoir aux besoins d’une population humaine de taille donnée), montre aujourd'hui qu'il faudrait 3 planètes pour généraliser le mode de consommation français. La commission Attali sur la libération de la croissance se trompe d'époque en pensant reproduire des modèles dépassés.
Propositions :
Concernant le financement de la Sécurité Sociale, Les Verts s'opposent à la culpabilisation des assurés sociaux et à la restriction des droits qui touchent toujours principalement les personnes les plus défavorisées, à travers en particulier du mécanisme des franchises médicales. Il y a une aggravation de la rupture de la solidarité entre les bien-portants et les malades avec le rajout d'une deuxième franchise, après celle dite franchise « 1 euro ». Cela handicape particulièrement les malades chroniques qui sont obligés de suivre un traitement régulier et d'avoir des soins complémentaires.
Pour les Verts, il ne faut pas se limiter à une analyse économique pour changer de stratégie et de logique, en passant d'une logique de soin à une logique de santé. Il faut mettre en place des politiques de prévention et de réduction des risques. Un Grenelle de la Santé pourrait être demandé. En attendant, le Grenelle de l'environnement reste un élément très important de toute politique de réduction du déficit de la sécurité sociale. Ce ne sont pas les malades victimes qu'il faut pénaliser mais il faut aller à la source des pathologies (réduction des pesticides, de l'incinération des déchets, des OGM, des pollutions...). C'est pour cela que la question du financement du Grenelle de l'environnement est centrale dans les mois à venir.
Sinon, le financement des différentes branches doit respecter le principe de la solidarité entre les assurés sociaux mais aussi entre les citoyens. Les Verts sont favorables à l’élargissement de l’assiette de financement de la protection sociale et soutiennent depuis les années 90 un transfert croissant des cotisations sociales de la masse salariale vers la valeur ajoutée (nette) de l’entreprise de façon à neutraliser les choix de production des entreprises ; que les entreprises choisissent d’embaucher ou d’investir, elles contribueront à la protection sociale en payant une cotisation sur la valeur ajoutée produite. Cette cotisation sur la valeur ajoutée est préférable à la TVA sociale car elle limite l’effet d’aubaine pour les entreprises. Avec la TVA sociale, la baisse des cotisations patronales doit, logiquement, entraîner une baisse du prix HT qui vient compenser l’augmentation de la TVA. Mais rien n’interdit les entreprises de conserver le différentiel et de ne pas baisser le prix HT. Avec la cotisation sur la valeur ajoutée, c’est toujours l’entreprise qui paie, et non, directement, le consommateur.
Concernant la question du pouvoir d'achat, il y a une erreur d'analyse à se limiter à la question du niveau du SMIC. Le SMIC mensuel n'est plus la norme salariale minimale avec l'augmentation des temps partiels. C'est pour cela que les Verts préconisent l'instauration d'une prime salariale pour les premières heures pour des temps partiels. Pour tout contrat à mi-temps, le salaire minimum ne pourra être inférieur à 66% du SMIC temps plein. De même, nous demandons une augmentation des minima sociaux. Et nous défendons l'instauration d'un Revenu Social Garanti. De plus, la question du pouvoir d'achat ne peut s'aborder uniquement à travers le prisme de l'augmentation des revenus mais aussi à travers la baisse des charges, compte tenu des tensions structurelles sur la hausse du coût de la consommation (hausse du pétrole, des produits agricoles...). Par exemple, favoriser les transports en communs est tout aussi utile pour les classes moyennes que d'augmenter les revenus.
Concernant les régimes spéciaux, nous critiquons la méthode de négociation du gouvernement qui est en fait une méthode du fait accompli et de réduction des acquis sociaux. Même si nous défendons la mise en place d'un véritable régime universel de retraites, il n'est pas possible d'effacer l'histoire des mouvements sociaux sans négociation collective et d'oublier certains régimes spéciaux comme celui des militaires. Il ne peut y avoir d'exception au principe du régime universel ! De plus, les régimes spéciaux qui sont accusés d’être les premiers responsables du trou prévisionnel des régimes de retraite ne représentent que 2 à 5% de ce déficit selon le rapport du Conseil d'orientation des retraites. La négociation doit être globale, c'est-à-dire tenir compte des salaires, des primes, du temps de formation, des évolutions de carrière, de l'âge de départ à la retraite et des conditions de travail (pénibilité du travail par exemple), autant de paramètres influençant le calcul de la retraite. L’objectif prioritaire du nouveau compromis social à trouver est de conserver le système de retraite par répartition, afin d'éviter un déplacement progressif vers un système de capitalisation.
Mais la question du temps de travail devrait être prise en compte sur l'ensemble de la vie active. Les récentes attaques du gouvernement à travers les amendements UMP n'ont pas eu un écho suffisant : attaque contre les 35 heures dans la branche de l'agroalimentaire en cassant les accords collectifs d'annualisation du temps de travail par introduction de la possibilité de modification individuelle entre l'employeur et le salarié et dans le secteur des équipementiers automobile par modification du temps de travail effectif pour calculer le paiement des heures supplémentaires.
Pour terminer, la hausse du prix du pétrole, des produits agricoles, les conséquences des déréglements climatiques devraient pousser les autorités européennes à modifier les modes de production et de consommation. Au lieu de se limiter à des mécanismes de marché (écotaxes à effets désincitatifs, subventions à effets incitatifs), il faudrait réaliser les investissements dans les biens communs que le marché ne peut pas réaliser (ferroutage, isolements des établissements publics et privés, recherche dans les énergies renouvelables...) et qui sont pénalisés par des taux d'intérêts élevés. Si on peut comprendre l'attitude de la BCE de ne pas baisser les taux pour éviter de refinancer à bas coût les banques ayant pris des risques sur le marché des subprimes, il n'en demeure pas moins qu'il est indispensable de modifier les règles européennes pour répondre aux enjeux de la période : baisse des taux de la BCE, règles prudentielles bancaires, pénalisations des banques ayant des pratiques antisociales et risquées,...)
Jérôme Gleizes
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