Écoquartier de Fribourg : de l’empreinte à l’intime
Imaginez… Vous habitez un écoquartier, dans un logement passif. Vous travaillez à deux pas, votre voiture est aux oubliettes. Votre meilleur ami a été embauché à la boutique associative voisine, créatrice d’emplois. Des jardins collectifs prolongent le spectacle des vignes alentour. Le tissu social est stimulant et les enfants ont leur place au cœur de la cité. Vous ne rêvez pas… Fribourg l’a fait !
Partez habiter dans un écoquartier de Fribourg. Que se passe-t-il ? Votre empreinte écologique baisse. En effet, l’accès à des services pauvres en énergie grise et peu consommateurs d’énergies fossiles est facilité, à commencer par le bâti. En effet, dans le quartier Vauban, aucune construction ne consomme, pour l’eau chaude et le chauffage, plus de 65 kWh/m²/an, conformément à la règlementation mise en place par la municipalité dans les années 90. Des mesures incitatives ont favorisé les bâtiments à basse énergie (55kWh/an/m²), passifs (moins de 15 kWh/an/m² pour le chauffage), ou à énergie positive : de nombreux toits hébergent des panneaux solaires, qui fournissent près de 65 % de l’électricité utilisée par le quartier, le reste étant produit par la centrale à cogénération.
Déplacements limités
La mobilité, gros poste d’émission de GES, a été conçue autour du concept de quartier des courtes distances. Habitat, travail, services et équipements sont toujours assez proches pour se passer d’automobile, devenue un choix parmi d’autres et non plus une contrainte. Arrêts de bus et de tramway sont à moins de 500 m des logements et des lieux de travail, un peu plus centraux que les deux parkings situés à la périphérie. Le tramway rallie le centre de Fribourg en dix minutes. L’intérieur du quartier est débarrassé de l’omniprésence des autos qui ne peuvent y stationner que brièvement.
Si vous avez vraiment besoin d’une voiture, inutile d’en être propriétaire. Seize véhicules sont mis à disposition par l’association de partage automobile : il suffit de réserver sur Internet. La location d’une camionnette de 10 m3 pendant sept heures vous coûtera 38 euros. Pour remplir le réservoir d’essence ou de gaz, une carte posée dans la boîte à gants remplace votre porte-monnaie à la station service.
Une boutique de produits biologiques se trouve au rez-de-chaussée du Sonnenschiff, bâtiment regroupant bureaux et commerces. Vous pouvez aller faire vos courses à la boutique associative, la Quartiers Laden. En devenir membre signifie bénéficier de réductions et participer au maintien d’emplois locaux. Le restaurant Süden propose trois menus cuisinés avec des produits régionaux et biologiques : végétalien, végétarien et classique, pour 6 à 8 euros. Le restaurant est situé dans une ancienne caserne de l’armée française rénovée. La bâtisse fait office de mairie annexe et accueille nombre des activités associatives du quartier. Face à elle, la Grand-Place, où se tient chaque mercredi le marché de producteurs locaux.
Paysages intérieurs
Comme cela est arrivé à Alice, vous avez diminué… Mais le second changement, perceptible depuis l’intérieur des logements, tient du relationnel avec la nature. L’urbanisme a été conçu autour de la préservation des vieux arbres et des biotopes préexistants. Les jardins collectifs et particuliers, au sol ou suspendus, créent une liaison avec les vignes et les collines. Les limites entre parcelles, de même qu’entre ville et nature, sont peu marquées. Cette relation dedans-dehors constitue le motif récurrent de l’habitant de Vauban, et en particulier du Solarsiedlung, le lotissement solaire.
Il existe un lien cohérent entre la photosynthèse des arbres de la réserve contiguë et la production énergétique des toits solaires. Les grandes baies vitrées, orientées au sud, s’ouvrent sur un extérieur omniprésent. Dedans, ce sont vos convictions écologiques, votre éthique ; dehors votre mode de vie, votre cadre quotidien. Ces continuités font écho aux continuités élémentaires – telle celle de la succession des saisons – et remplacent les ruptures permanentes de quartiers et de villes pensés comme des abstractions hors sol pour des habitants dépourvus de corps. Et comme par hasard, ici, l’indice de fécondité est l’un des plus élevé d’Allemagne…
Elsa Gueziel
Cet article est issu du dossier "Ecologie du bâti" de La Baleine n°151 - Septembre 2007. Pour consulter La Baleine en ligne, cliquez-ici
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